Beauté Roger Llorca
Beauté
Beauté, si je devais te donner un’image,
Beauté, si’l me fallait définir tes valeurs,
Beauté, si je devais te donner un visage,
Beauté, si’l me fallait définir tes couleurs,
Beauté, si je devais te donner apparence,
Beauté, si’l me fallait définir ta saveur,
Beauté, si je devais te donner une essence,
Beauté, si’l me fallait te donner un’odeur,
Je prendrai un crayon, un pinceau, une toile
Et laissant libre cours à l’imagination,
En quelques traits précis, comm’un sein qu’on dévoile,
Surgirait du néant, comm’un cri d’émotion,
Les formes de l’amour, puis le corps d’une femme.
Avec quelques épis d’or, cueillis dans la campagne,
Je tresserais des nattes pour faire ses cheveux.
Avec des bouts de ciel, volés sur la montagne
J’ajouterais aussi, pour en teindre ses yeux
Quelques bouts de soleil, quand il brûle en été.
Avec la peau de pêche, qui servirait de fard,
Je ferais sur ses joues quelques touches rosées,
Qui sauraient relever l’éclat de son regard.
Le velours de sa peau serait du blanc d’écume,
De la vague qui joue en atteignant la grève,
Et sa douceur soyeuse, comm’un toucher de plume.
Un doux coquelicot dessinerait ses lèvres.
L’allure du félin lui donnerait l’aisance,
Les reliefs adoucis formeraient ses rondeurs,
Le parfum du printemps, l’odeur de sa présence.
De tout l’amour du monde je remplirais son cœur.
Je mettrais dans ses yeux, par un tour de magie,
Avec de l’eau de lune, recueillie sur les cimes,
Une larme de joie ou bien de nostalgie
Car la beauté est gaie, mais le spleen la sublime.
Et je lui donnerais un beau nom d’Italie,
Avec des armoiries de soie et de dentelle,
Avec l’accent qui chante et le cœur qui sourit,
Beauté, je t’ai choisie, tu as pour nom Angèle.
Roger Llorca 1962